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Attac
Association québécoise pour la Taxation des Transactions financières et pour l'Action Citoyenne

BULLETIN NO 30 NOVEMBRE 2010

Écouter l'Afrique

Alors que se tiennent les journées québécoises de la solidarité internationale sur le thème « redéfinir le développement », le bulletin se penche sur le commerce international et les règles qui le régissent, mais surtout sur les rapports de force qui l'animent en donnant la parole à l'Afrique. Après 50 ans d'indépendance et d'aide au développement pendant lesquelles, le Nord a défini, à sa façon, le développement, on constate que les inégalités subsistent : l'Afrique demande qu'on l'écoute et qu'on la laisse définir elle-même ses problèmes et ses solutions.

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Le billet du CA: La droite réclame le droit au pillage

par Robert Jasmin
Coprésident d'ATTAC-Québec

Non satisfaite d'avoir plongé les populations du monde dans une crise qui est loin d'avoir livré toutes ses secousses, la droite veut nous faire faire un pas de plus vers le gouffre.

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Prêter l'oreille pour engager des actions solidaires

par Monique Jeanmart

Militante féministe et alter-mondialiste, Aminata Traoré était à Montréal pour ouvrir la 14e édition des journées de la solidarité internationale.

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Le (doux ?) commerce

par Cédric Leterme

À l'heure où le Canada négocie un accord de libre-échange avec l'Union européenne qui en laisse plus d'un sceptique, où les négociations à l'OMC semblent irrémé-diablement bloquées et où de nombreux observateurs s'inquiètent d'un « retour du protectionnisme », il peut être utile de revenir sur l'architecture actuelle du commerce mondial et sur les enjeux qui la caractérisent.

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OMD 2015 -
arrêter la comédie !

Communiqué de presse
d'ATTAC Gabon

À l'occasion du sommet du Millénaire pour le développement organisé par les Nations Unies en septembre 2000, 189 États s'engageaient autour de huit Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD) afin d'éradiquer l'extrême pauvreté et de réduire les inégalités dans le monde à l'horizon 2015.


La droite réclame le droit au pillage

par Robert Jasmin, coprésident d'ATTAC-Québec

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Non satisfaite d'avoir plongé les populations du monde dans une crise qui est loin d'avoir livré toutes ses secousses, la droite veut nous faire faire un pas de plus vers le gouffre. Il ne faut pas trop s'attarder à notre petite droite nationale qui vient de bomber le torse histoire de nous rappeler qu'elle existe, car celle-ci n'est que le pâle reflet de celle dont elle s'inspire, la « canadian », qui elle-même se voudrait américaine (leur espoir que soit créée une chaîne de télévision de propagande à la sauce FOX News en dit long sur leur mimétisme). Il n'y a qu'à écouter les ténors de cette mini-droite du réseau liberté pour s'en convaincre : les mêmes mantras, les mêmes obsessions anti-état, la même paranoïa devant les organisations syndicales, en somme le libéralisme extrême servi dans notre langue. Alors, pourquoi ne pas examiner l'original, autrement plus menaçant depuis leur prise de pouvoir chez nos voisins du sud.

Il ne faudrait pas croire qu'elle n'était pas au pouvoir avant l'élection. Celle-ci ne vient qu'officialiser ce pouvoir en lui donnant un vernis de couleur démocratique. Mais justement, forte de cette légitimité acquise par l'argent, elle risque de mettre encore plus d'ardeur et d'efficacité dans sa volonté de neutraliser toute tentative de réglementation de la part des pouvoirs publics. En s'emparant de l'État, la droite désire l'asservir en fonction des intérêts qu'elle défend qui sont ceux de la minorité de possédants et réduire voire, dans certains cas, éliminer sa présence dans le domaine des services.

Pour la droite, il n'y a pas de bien commun, il n'y a que des biens à destin individuel livrés en pâture aux plus forts. Pour la droite, il n'y a pas de futur, il n'y a qu'un présent dont il faut tirer le maximum. Pour la droite, le droit au pillage est un droit naturel qui découle du principe de liberté. Pour la droite, l'État n'est là que pour veiller à ce que cette liberté ne souffre d'aucune limite ou pour faire la guerre afin de trouver des débouchés à l'industrie des armes.

Il aura fallu cette descente aux enfers pour que certains intellectuels américains se lèvent enfin pour appeler à la mobilisation contre l'agrégation de tous ces éléments que l'un d'eux, Chris Hedges, qualifie de recette pour le fascisme. Là-bas comme ici, il est de notre devoir de rappeler haut et fort certains principes de civilisation. Dire et répéter que le droit de propriété et le droit aux profits ne sont pas des droits absolus, qu'ils doivent être balisés par les exigences du bien commun présent et à venir, limités par une nature finie, soumis à des règles strictes de répartition des richesses et dans certains domaines, tout simplement interdits. Une telle prise de position ne découle pas d'un choix idéologique, les faits l'imposent. Selon l'économiste progressiste James Kenneth Galbraith, sans une planification rigoureuse et un contrôle public pointilleux de la répartition des revenus et du financement de l'économie, le monde, l'Amérique en tête, court de nouveau à la catastrophe. Rude lutte en perspective. Nous ne pouvons pas nous battre pour les Américains, mais nous pouvons faire notre part ici. La constitution récente d'une Alliance sociale est de bon augure.


Le (doux ?) commerce

par Cédric Leterme

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À l'heure où le Canada négocie un accord de libre-échange avec l'Union européenne qui en laisse plus d'un sceptique (1), où les négociations à l'OMC semblent irrémédiablement bloquées et où de nombreux observateurs s'inquiètent d'un « retour du protectionnisme », il peut être utile de revenir sur l'architecture actuelle du commerce mondial et sur les enjeux qui la caractérisent.

Petit retour en arrière. Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, les grandes puissances, traumatisées par l'expérience des années 30, décident de fixer un cadre juridique au commerce international destiné à en garantir le bon fonctionnement sur une base libérale. Un commerce sans entrave est supposé contribuer à la prospérité de tous, mais à condition, bien sûr, que chacun respecte les règles du jeu. C'est ainsi que le GATT (General Agreement on Tariffs and Trade), l'ancêtre de l'actuelle Organisation mondiale du Commerce, voit le jour en 1949, dans le but d'obliger les États à respecter la liberté de commerce. Cependant, le fait qu'il ne couvre ni l'agriculture, ni le textile et que son système de règlement des différends manque cruellement d'efficacité en limite sérieusement la portée. Il faudra attendre 1994 pour que la régulation du commerce international prenne une autre dimension. Cette année-là, on signe à Marrakech l'accord instituant l'Organisation Mondiale du Commerce (OMC). En plus du champ d'application du GATT, celle-ci recouvre désormais également l'agriculture, le textile, les services et la propriété intellectuelle. Parallèlement, le système de règlement des différends est renforcé et devient l'un des plus contraignants au monde en matière de droit international.

L'enthousiasme face à cette nouvelle donne est toutefois loin d'être généralisé. On lui reproche d'abord de ne pas remédier aux déséquilibres qui existent en faveur des pays industrialisés voir, dans certains cas, de les aggraver. Rien d'étonnant puisque ce sont essentiellement les pays riches qui ont négocié et fixé les règles entre eux, avant de les soumettre ensuite à ratification au reste des États membres. Ainsi, bien loin d'établir un « level-playing field » (2) qui garantirait une utopique concurrence libre et non faussée entre les États, l'OMC reflète surtout les rapports de forces qui ont présidé à son adoption et qui se traduisent par un cadre juridique grossièrement favorable aux pays développés. L'autre critique de taille formulée à l'encontre de l'OMC concerne la primauté qu'elle accorde aux considérations strictement économiques. De par l'étendue de son champ d'action, l'organisation est en effet compétente dans des domaines qui débordent le seul cadre commercial et qui ont des implications sociales, environnementales et politiques. Or, le critère qui guide l'action de l'OMC est la poursuite d'une réduction maximale des obstacles au commerce. Des mesures visant la protection de l'environnement ou la défense d'acquis sociaux sont dès lors souvent considérées comme des atteintes illégitimes à la liberté de commerce. La souveraineté des États dans ces domaines se trouve donc limitée par une organisation défendant des intérêts purement économiques et dont le fonctionnement échappe par ailleurs à tout contrôle démocratique.

Cette montée en puissance de l'OMC dans le courant des années 90 s'inscrit en outre dans une dynamique plus large d'approfondissement du modèle néolibéral au niveau mondial. C'est le triomphe du « consensus de Washington »(3), dont le FMI et la Banque Mondiale imposent les diktats aux pays du Sud, avec les conséquences sociales que l'on connaît. La violence de cette offensive finit par susciter une révolte légitime de la part de ceux qui la subissent ou qui la jugent tout simplement injuste. À Seattle, en 1999, la conférence ministérielle de l'OMC (que beaucoup considèrent comme l'acte de naissance de l'altermondialisme) est notamment le théâtre de manifestations spectaculaires qui parviennent à paralyser la réunion et à forcer son ajournement. On réalise à ce moment-là qu'il ne sera plus possible de faire fi des critiques. En 2001, l'OMC lance à Doha le « cycle du développement ». Une nouvelle ronde de négociations censée approfondir l'intégration commerciale mondiale, en tenant compte davantage cette fois des besoins des pays pauvres. Les vœux pieux et les déclarations de bonnes intentions cèdent pourtant vite le pas à la réalité des rapports de forces, mais celle-ci n'est plus tout à fait la même. Les pays du Sud, sous l'impulsion des nouvelles puissances émergentes (Brésil, Chine, Inde, etc.), décident en effet de faire bloc et tiennent tête aux pays industrialisés. Ils refusent toute avancée dans les domaines de la libéralisation des services et de la protection de la propriété intellectuelle tant qu'ils n'obtiennent pas de garanties de la part des pays développés dans le domaine agricole. La conférence de Cancun, en 2003, se termine donc de nouveau sur un constat d'échec et la situation demeure bloquée jusqu'à ce jour.

Si cette crise de l'intégration commerciale multilatérale est une bonne nouvelle pour ceux qui en ont toujours contesté l'orientation néolibérale, elle ne marque pas pour autant l'avènement d'un ordre commercial mondial plus juste, loin de là. D'abord, parce que face aux difficultés croissantes rencontrées par l'approche multilatérale, beaucoup d'États se sont tout simplement tournés vers le bilatéralisme. Il est en effet nettement plus facile de négocier un accord de libre-échange à deux et ça focalise singulièrement moins l'attention médiatique et la vigilance citoyenne (le cas de l'Accord Canada - Union Européenne en est la parfaite illustration). En outre, il ne faut pas croire que l'opposition des pays du Sud aux revendications du Nord soit nécessairement altruiste. Pour beaucoup, il s'agit simplement d'exiger un rééquilibrage des rapports de force qui reflèterait mieux la nouvelle réalité économique mondiale. On cherche juste à obtenir sa « part du gâteau », sans que les règles du jeu soient elles-mêmes remises en cause. Cependant, une telle remise en question de la logique même qui sous-tend l'architecture commerciale mondiale existe bel et bien. Elle peut même compter depuis peu sur d'importants relais étatiques, notamment en Amérique latine. Avec la création de l'ALBA (l'Alternative bolivarienne pour les Amériques), les gouvernements progressistes de la région montrent en effet qu'il est possible d'envisager des relations économiques interétatiques sur d'autres bases que celles du néolibéralisme. Cet accord, conclu initialement entre Cuba et le Venezuela (et auxquels se sont joints par la suite la Bolivie, l'Équateur, le Nicaragua, la Dominique, Saint-Vincent et les Grenadines et Antigua et Barbuda) subordonne en effet les échanges commerciaux entre pays membres à des objectifs sociaux comme la lutte contre la pauvreté ou l'accès à l'éducation. Aux antipodes du culte de la concurrence qui prévaut à l'OMC et dans la plupart des accords de libre-échange, l'ALBA consacre la primauté du principe de solidarité et reconnaît la nécessité de corriger les asymétries économiques et sociales entre États, en privilégiant leur complémentarité. Il institue également la possibilité d'échanges en nature, ouvrant ainsi la voie à un dépassement des rapports strictement marchands.(4)

Parallèlement à cette initiative encourageante, on trouve également dans le mouvement altermondialiste de nombreuses pistes de réflexion pour poser les bases d'un système commercial plus juste. Beaucoup vont naturellement dans le même sens que l'ALBA, notamment en ce qui concerne la nécessité de se soustraire de la dictature de l'économie et de remettre celle-ci au service d'un projet social démocratiquement défini. Mais la contrainte environnementale en pousse également de plus en plus à revendiquer une revalorisation du local et de l'autosuffisance face au modèle actuel de développement par et pour les « marchés internationaux ». L'objectif serait de réorienter les activités de production vers la satisfaction des besoins locaux ainsi que de limiter les échanges internationaux au minimum nécessaire. Ceci permettrait de limiter les gaspillages et les coûts environnementaux colossaux qu'on observe actuellement tout en rendant les sociétés plus résilientes face aux crises qui les affectent. Ces arguments sont présents notamment chez les partisans de la décroissance, qui les intègrent dans une réflexion plus générale sur les limites de nos sociétés de croissance infinies et sur les façons de les rendre plus justes et plus soutenables à long terme.(5)

On le voit, la question commerciale est indissociable du débat proprement politique qui existe autour des principes qui doivent guider l'organisation de nos sociétés, notamment au niveau de leurs relations au niveau mondial. Or, dans ce débat-ci comme dans d'autres, la perte de légitimité du modèle actuel ne s'accompagne pas nécessairement de la mise en place d'alternatives plus équitables. Celles-ci ne pourront intervenir que s'il existe une pression citoyenne suffisante pour les faire aboutir. Alors, mobilisons-nous !

 

(1) : Voir à ce propos la lettre ouverte publiée dans le Devoir du 20 octobre 2010, signée par un collectif d'auteurs parmi lesquels on retrouve plusieurs personnalités d'ATTAC.  

(2) : Expression fétiche du jargon libéral, qui est censée désigner une situation de concurrence libre et non faussée.  

(3) : Cette expression fut utilisée pour la première fois par un économiste américain en 1989 pour désigner le consensus qui régnait entre les Etats-Unis et les principales Organisations économiques internationales (Banque Mondiale, FMI) autour des grandes orientations économiques à imposer aux pays en difficulté. Il consiste en un corpus de 10 mesures devenues largement emblématiques de l'agenda néolibéral (privatisation, libéralisation, dérégulation, etc.).  

(4) : Pour plus d'informations sur l'ALBA et l'Amérique latine en général, vous pouvez visiter le site du RISAL (Réseau d'Informations et de Solidarité avec l'Amérique Latine) : www.risal.collectifs.net.  

(5) : Voir par exemple cet article de Serge Latouche, un des principaux penseurs de ce courant :
« Pour une société de décroissance ».  


Prêter l'oreille pour engager des actions solidaires

Compte rendu par Monique Jeanmart

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Militante féministe et altermondialiste, Aminata Traoré (1) était à Montréal pour ouvrir la 14e édition des journées de la solidarité internationale. Avec pour thème cette année « redéfinissons le développement », Aminata Traoré a commencé la semaine par une critique impitoyable du modèle néolibéral.

D'entrée de jeu, elle rappelle que 17 pays africains ont fêté cette année 50 ans d'indépendance, mais que, même si les dirigeants africains ont célébré cet anniversaire avec des festivités coûteuses, d'indépendance il n'y a pas et il n'y a jamais eu : refaire l'histoire de l'Afrique, c'est refaire l'histoire de sa domination et de sa soumission. Son bilan de ces 50 années est négatif et pessimiste : il n'y a pas d'indépendance ni économique, ni politique parce que les colonisateurs d'hier ont été remplacés par les décideurs des institutions internationales comme la Banque mondiale, le Fonds monétaire international (FMI). Mais c'est toujours le Nord qui décide pour le Sud avec la complicité des élites politiques locales qui même si elles sont élues, ne se sentent pas redevables à leur population quand elles ne sont pas corrompues.

Si ces pays se sont libérés du colonialisme, depuis les années 80 le paradigme du développement se résume à l'ouverture des marchés, c'est-à-dire la soumission aux règles du commerce international qui leur sont défavorables, règles qui ont été définies à leur avantage par les pays riches (2). Cette intégration aux marchés internationaux a eu des conséquences économiques désastreuses ainsi qu'un cout social et humain énorme. En agriculture, par exemple, l'intégration au marché signifie produire pour l'exportation des biens tels le coton, le café, le cacao, etc. qui seront achetés au prix fixé par le marché. Plus récemment, l'intégration au marché, signifie, l'accaparement direct des terres par des pays ou des entreprises qui vont produire directement, en Afrique, les produits dont ils ont besoin ou qu'ils veulent vendre (3). Quelle que soit la stratégie, les pays africains depuis qu'ils sont intégrés au marché sont toujours perdants.

Pour imposer ce modèle de « développement », il a fallu convaincre l'Afrique de son « sous-développement » : à force de se faire dire qui ils sont, quels sont leurs problèmes, comment s'en sortir, les Africains n'ont plus de regard sur eux-mêmes, ni même de mots pour dire ce qu'ils vivent. Dans cette vision tous les maux de l'Afrique prennent naissance en Afrique - mais il n'y a pas de choix de solution, pas d'autonomie de pensée, ni de décision. Les solutions imposées de l'extérieur sont bonnes : les échecs sont ceux des États qui sont des élèves médiocres ou corrompus.

Pour Aminata Traoré, l'histoire de l'Afrique consiste à se faire « imposer » un modèle de « développement » qui, s'ils portent des noms différents selon les époques (colonialisme, mondialisation, néolibéralisme) est basé sur le même paradigme de domination, qu'il s'appelle commerce ou pillage (ce que les industries minières font actuellement) le résultat est le même : une lente déstructuration du tissu social et une érosion du pouvoir des sociétés civiles. La critique est impitoyable, mais, sans doute parce qu'elle est sociologue, Aminata Traoré voit dans la culture et dans l'action avec les groupes de base de la société, une voie de sortie de l'impasse actuelle. Il faut retrouver, dans les langues locales, les mots qui permettront de définir ce que devrait être le développement des pays africains. Au-delà des mots, ce sont des valeurs, telles la solidarité, l'entraide, qui ont toujours fondé le vivre ensemble, qu'il faut retrouver. Utiliser les repaires de leur propre culture devrait permettre aux Africains de comprendre leurs problèmes et de trouver leurs propres solutions. C'est à cette fin qu'Aminata Traoré s'investit sur le terrain dans des actions de proximité avec les femmes, les jeunes et les citoyens concernés dans des actions citoyennes de restructuration des milieux de vie, comme un centre de formation basé sur les savoirs traditionnels, la construction d'un marché pour les produits locaux, une galerie pour l'art traditionnel, etc.

 

(1) : Aminata Traoré est également chercheure, écrivaine (Le viol de l'imaginaire, L'Afrique humiliée), ministre de la Culture et du Tourisme (Mali, 1997-2000).  

(2) : Voir dans ce bulletin, l'article de Cédric Leterme.  

(3) : Voir le bulletin d'ATTAC Québec, numéro 25, mai 2009 et dans le présent bulletin le communiqué d'ATTAC Gabon ; voir aussi le bulletin d'ATTAC Québec, numéro 26, septembre 2009.  


OMD 2015 - arrêter la comédie !

Communiqué de presse d'ATTAC Gabon

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À l'occasion du sommet du Millénaire pour le développement organisé par les Nations Unies en septembre 2000, 189 États s'engageaient autour de huit Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD) afin d'éradiquer l'extrême pauvreté et de réduire les inégalités dans le monde à l'horizon 2015. Il s'agissait entre autres «  de faire du droit au développement une réalité pour tous et de mettre l'humanité entière à l'abri du besoin », de combattre la faim et la pauvreté, de préserver l'environnement, d'améliorer l'accès à l'éducation et à la santé, de promouvoir l'égalité entre les hommes et les femmes, etc. Dix ans après le lancement des OMD et aux deux tiers de leur parcours, il est constaté à l'unanimité un triste bilan.

Même si des progrès sont consentis dans certains domaines comme l'éducation, avec le taux de scolarisation primaire qui est passé de 83 à 88 % de 2000 à 2007 et une augmentation de la scolarisation de 15 et 11 % en Afrique subsaharienne et en Asie du Sud; en santé, on constate la diminution de la mortalité des enfants de moins de cinq ans presque partout dans le monde entier qui est passée de 12,6 millions de décès en 1990 à 9 millions en 2007 en dépit de la croissance de la population, la diminution des nouvelles infections au VIH ainsi que la réduction du nombre de décès occasionnés par le virus... La majeure partie des promesses n'ont pas été tenues et ne sont pas prêtes de l'être pour 2015. D'abord le premier objectif, visant à « réduire de moitié, d'ici 2015, la proportion de la population mondiale dont le revenu est inférieur à un dollar par jour et celle des personnes qui souffrent de la faim ». Même si l'on se félicite de la baisse de la proportion de personnes vivant avec moins d'un dollar par jour (23,4% en 1999 à 19,2% baisse à l'actif de l'essor économique de la Chine), elle reste fixée à 40 % pour les populations d'Afrique subsaharienne. Le taux de mortalité maternelle reste encore très élevé, «  chaque jour, près de 1.000 femmes décèdent au moment de leur accouchement ». Même constat pour la sous-nutrition, car aujourd'hui en 2010, 16% de la population mondiale est encore sous-alimentée. La famine frappant les zones sahéliennes témoigne de la vulnérabilité persistante de l'Afrique subsaharienne, où une personne sur trois continue de souffrir de la faim, selon l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO).

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Même si, dans le document de synthèse que vont adopter dans son ensemble les chefs d'État et de gouvernement lors du sommet des Nations Unies qui se tient du 20 au 22 septembre sur la question, ils regretteront « profondément de devoir constater que le nombre de personnes vivant dans l'extrême pauvreté et touchées par la faim dépasse le milliard et que les inégalités, entre pays comme à l'intérieur des pays, restent un problème majeur », ils incrimineront bien entendu l'impact d'une crise économique qui a « accru les vulnérabilités, creusé les inégalités et porté atteinte aux progrès accomplis en matière de développement » tout en renouvelant la promesse de « faire tout ce qui est en leur pouvoir pour atteindre les Objectifs du millénaire pour le dévelop-pement » avant l'échéance butoir de 2015; il y a comme un air de mauvaise foi de la « communauté internationale » à honorer des engagements librement pris au nom de « la lutte contre la pauvreté ».

L'objectif de 0,7 % du revenu national brut, fixé pour les pays donateurs par les Nations Unies à titre de l'Aide publique au développement (APD) est loin d'être atteint tout comme la promesse « d'en finir avec les paradis fiscaux et judiciaires » qui privent chaque année les pays « pauvres » de 700 à 900 milliards de dollars pour leur développement, soit 6 à 8 fois plus que l'Aide publique au développement mondiale cumulée. On ne parle même pas des milliards de dollars éjectés chaque année par les pays « pauvres » en direction des pays « riches » au titre de remboursement de la dette, une dette totalement odieuse ainsi que des mécanismes laborieusement mis en place pour perpétuer son remboursement (initiative PPTE entre autres). Une « aide » aussi fantoche, inefficace, inadaptée que disproportionnée; l'Irak par exemple « bénéficie d'une aide représentant le double de celle accordée à l'Afghanistan, ce dernier bénéficiant à son tour d'une aide de 50 % supérieure au 3e bénéficiaire, l'Éthiopie ». Qu'on pense aux 3.000 milliards de dollars sortis, on ne sait, d'où pour sauver une poignée de banques commanditaires de la crise économique née justement des dérives du néolibéralisme et l'incapacité de trouver les 30 milliards de dollars annuels nécessaires à la mise en place des Objectifs du millénaire pour le développement. Ceci prouve l'absence de volonté des pays « riches » et de la gouvernance mondiale décrétée (G8, G20) à en finir avec la pauvreté en dépit des belles paroles prononcées ici et là.

Fort de ce constat, Attac Gabon rejette les Objectifs du millénaire pour le développement, promeut un développement pensé et exécuté par des Africains pour les Africains tenant compte des spécificités sociales, économiques, culturelles, morales du continent. La vraie cause de la pauvreté et des inégalités en Afrique c'est bien le fonctionnement même de l'économie mon-diale. Ce serait un leurre de vouloir combattre la pauvreté sans pour autant s'attaquer aux mécanismes qui la créent et l'accentuent de jour en jour. L'exploitation effrénée des ressources naturelles avec le lot de conséquences sociales, environnementales sur les populations qui ne profitent guère des richesses ainsi engendrées, le service de la dette qui empêche les États de mener une politique sociale responsable, la substitution des gouvernements en chien de garde des nouveaux colons qui sont, non seulement d'autres États « riches », mais également des lobbys et des multinationales... sont bien des problèmes qui ne peuvent intéresser la « gouvernance mondiale » en partie responsable.

Consciente que le développement du continent ne se décrètera pas à une tribune quelconque, Attac Gabon en appelle à une accentuation de la mobilisation de la jeunesse consciente et engagée africaine pour faire échec aux politiques et mécanismes néolibéraux qui créent la pauvreté afin de pouvoir sortir définitivement de ce cycle infernal.


Un livre à ne pas manquer

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La Bourse contre la vie
Dérive et excroissance des marchés financiers

Ce livre démystifie les opérations boursières et dénonce la place trop grande qu'elles occupent dans notre économie. La Bourse est abordée sous ses divers aspects : spéculation, produits dérivés, marché du carbone, fonds de retraite, cotes des entreprises, bulles économiques. Mais aussi, il raconte son histoire et décrit comment elle apparaît dans l'imaginaire des artistes. Avec ce dénominateur commun : la Bourse est un dangereux casino dont il faut réduire le champ d'action.

Ce livre est dédié à la mémoire de Raymond Favreau,
décédé en décembre dernier, qui a initié et coordonné ce livre.

Pour plus d'informations : visitez le site des Éditions MultiMondes.

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Coordonnatrice du bulletin :
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