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OMC : après Hong Kong, les conséquences pour l’AGCS

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Conférence ministérielle de l’OMC à Hong Kong – décembre 2005
Quelques unes des conséquences concernant l’Accord général sur le commerce des services (AGCS)

Avant toute chose, il faut lire les compte rendus de Hong Kong produits par Attac-France disponibles à l’adresse : http://www.france.attac.org ceux de Raoul Marc Jennar disponibles à l’adresse : http://www.urfig.org (section Hong Kong) ainsi que ceux du réseau Our world is not for sale à l’adresse : http://www.owinfs.org. Ce sont de précieux témoignages et analyses expliquant ce qui s’est passé à cette conférence. Leurs propos révèlent toute l’ampleur du caractère anti-démocratique des négociations de l’OMC dans ce qui apparaît de plus en plus clairement comme une guerre de domination socio-économique contre les pauvres. Ils montrent aussi à quel point le travail des grands médias est déficient et souvent complice de l’idéologie dominante.

Dans le grand marchandage de l’OMC à Hong Kong, qui fut mené dans la pire tradition anti-démocratique qui caractérise cette organisation (multiplication des réunions non-officielles en «green room» sur invitation et sans procès-verbaux, assemblée finale sans micros ou possibilité d’intervention, non-considération des objections des pays pauvres, etc.), il était clair qu’une entente aussi déficiente soit-elle concernant l’agriculture provoquerait une avancée sur les services. Malgré l’emphase mise sur l’agriculture, les services constituaient la question centrale à Hong Kong. Tous les analystes de la mouvance altermondialiste s’entendent pour dire que sur ce point, les pays riches ont obtenu ce qu’ils voulaient au détriment des pays pauvres – les premiers visés par la libéralisation des services – et sans avoir fait de concessions significatives sur les autres questions. C’est une victoire pour eux et les multinationales de services très présentes à Hong Kong. Et c’est une défaite pour les pays pauvres et tous ceux qui défendent l’importance des services publics qui s’en trouveront encore plus menacés.

À Hong Kong, l’AGCS se trouvait dans le document appelé l’Annexe C. D’emblée la déclaration finale de Hong Kong contient une fausseté de taille : elle prétend que l’Annexe C a été adoptée par le Conseil général de l’OMC, ce qui est faux. Celle-ci a fait l’objet de nombreux rejets de la part de nombreux pays. Et à Hong Kong, de nombreux pays en développement et la totalité des pays africains du groupe G90 s’opposaient à une telle avancée de l’AGCS et à de nombreux aspects de l’Annexe C. Mais ne pouvant accepter l’opprobe qu’ils se seraient attiré pour avoir fait échouer la conférence, ils se sont rangés (seuls le Venezuela et Cuba ont maintenu leurs objections).

Il faut redire à quel point le rapport de forces inégal entre les pays permet à une sorte de dictature économique de s’imposer à l’OMC. L’ouverture accrue des marchés dans le domaine de services, par l’AGCS, viendra verrouiller un processus amorcé par les politiques de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international qui ont déjà causé la privatisation de nombreux services publics dans les pays pauvres et en voie de développement. Les effets néfastes sur l’accès aux services publics, sur leur qualité, sur la possibilité de les développer, ne pourront que s’aggraver dans des domaines fondamentaux (eau, énergie, éducation, santé, transport, etc.). C’est sans parler des autres dispositions toujours existantes de l’AGCS, notamment celles ayant des impacts majeurs sur la capacité d’exercer le pouvoir public et de mener des politiques nationales, ce dont Attac traite ailleurs.

L’Annexe C sur les services implique donc ceci :

Jusqu’ici, les négociations de l’AGCS se faisaient suivant un système d’offres et de demandes de libéralisations de services faites d’un pays à un autre (base bilatérale dans un cadre multilatéral). Par exemple, l’Union européenne a fait des demandes dans les secteurs de l’énergie, de la poste et de l’environnement (eau pour la consommation humaine et traitement des eaux usées) au Canada ; le Canada a offert de libéraliser des services financiers, d’assurances et des services environnementaux comme l’assainissement ou la protection de la nature et des paysages.

Ce système offrait une certaine flexibilité en permettant aux pays d’ouvrir seulement les secteurs de services qu’ils désiraient et selon le degré voulu. Rappelons que libéraliser signifie ouvrir les marchés à la concurrence et que ce processus conduit presque mécaniquement au démantèlement des systèmes publics, la valeur prioritaire devenant larentabilité du service et non plus son universalité.

§7 de l’Annexe : À présent les offres et les demandes devront être menées sur une base bilatérale ou plurilatérale qui intégrera des approches par secteurs et par modes. Tout Etat membre qui se verra demander de négocier l’ouverture à la libéralisation de certains services par un autre État ou un groupe de pays devra examiner ces demandes et participer. Plus qu’auparavant, le rapport de forces sera déterminant. Les pays qui ont le poids de refuser le pourront (les pays importants), les autres devront justifier pourquoi et se trouveront en difficulté, surtout si, par ailleurs, ils sont endettés. Et même pour les pays du nord, la pression exercée sera une excuse imparable pour les gouvernements voulant libéraliser et qui se cacheront derrière l’OMC pour justifier leurs actions.

§11 de l’Annexe : Un échéancier serré est établi : 28 février 2006 pour adresser les demandes; une deuxième série d’offres pour le 31 juillet 2006; des projets de listes finales pour le 31 octobre 2006. On voit à quel point on souhaite l’intensification rapide des pourparlers. Cela est en lien avec le fait que le président Georges W. Bush bénéficie du «fast track» jusqu’à juin 2007 pour négocier des accords commerciaux sans que le Congrès américain puisse vraiment s’opposer et qu’il a peu de chance de voir cette mesure renouvelée.

§1e-i & ii de l’Annexe : Suppression ou réduction substantielles des exemptions et clarification de leur durée pour celles qui demeurent, dans le cadre du mode 4, ainsi que suppression ou réduction substantielles des examens de besoins économiques, pour le mode 4.

Qu’est-ce que le mode 4 ? C’est la possibilité pour un fournisseur de services d’un pays A (Canada) de faire appel à du personnel d’un pays B (Philippines), pour une période déterminée et selon les règles salariales et sociales du pays B (Philippines). Les pays prennent ou non des engagements sous ce mode.

Rappelons que dans les accords commerciaux en général, les exemptions n’ont pas vocation à durer éternellement. Elles doivent être reexaminées, rejustifiées et progressivement abolies. Cette mesure l’illustre bien.

§ 5 de l’Annexe : les Membres élaboreront des disciplines relatives à la réglementation intérieure conformément au mandat au titre de l’article VI:4 de l’AGCS avant la fin de la série de négociations en cours. Ce n’est pas nouveau mais cela témoigne de la volonté de mettre de la pression et d’intervenir sur les réglementations intérieures de tous les états (national jusqu’au municipal) avec une échéance fixe.

Qu’est-ce que des disciplines à l’OMC ? Ce sont des mesures visant à faire disparaître les lois et les règlements des pays, provinces et villes qui sont jugées nuisibles et considérés comme des obstacles non nécessaires au commerce. Qui en juge ? Les firmes privées qui disent au pays ce qu’elles veulent voir démanteler pour pouvoir opérer librement sans ces entraves que sont toutes les protections sociales, culturelles, environnementales, sanitaires qui prennent la forme de subventions, de lois et règlements contraignants, notamment les normes nationales imposant le service universel, etc.

Le rôle du Canada
Non seulement le Canada ne remplit-il pas son engagement de consacrer 0,7 % de son PIB à l’aide au développement mais il a poussé à Hong Kong cette avancée sur les services qui ne servira qu’à enrichir les grandes corporations. Cela est honteux et Attac Québec, avec d’autres groupes de la société civile, continuera de lui rappeler que la prospérité des entreprises n’est pas celle des populations. Voir la déclaration faite par des organisations canadiennes présentes sur place à ce sujet : http://www.canadians.org/

Ce faisant, le Canada met aussi à risque les services publics au Canada (en commençant par un sous-financement injustifiable qui sert à faire accepter l’idée d’une entrée du privé dans le secteur public). Rappelons que dans l’AGCS, dès qu’un service public (gouvernemental) est offert en concurrence (école privée vs publique par exemple) ou offert sur une base commerciale (payer des frais scolaires ou d’électricité), il est visé par l’AGCS et subira d’intenses pressions visant sa libéralisation. Les nouvelles règles de négociations convenues à Hong Kong faciliteront le processus.

Dans le domaine de la santé par exemple, si nos gouvernements (national ou provinciaux) permettent aux assurances privées d’offrir le même service que l’assurance santé publique, s’ils les mettent donc en concurrence, le système de santé public sera définitivement menacé par une libéralisation conduite sous les règles de l’AGCS et impliquant les fournisseurs des pays de l’OMC.


La suite des choses et les alternatives

À Hong Kong, la résistance s’est manifestée fortement à l’extérieur de la Conférence et à l’intérieur de la part des pays et de nombreux intervenants d’ONG. Seul un rapport de forces terriblement inégal (le capital financier contre les populations) permet aux acteurs de l’OMC d’agir en la méprisant. À la lumière de ces informations, il apparaît très clairement qu’il faut poursuivre le travail de sensibilisation des citoyens, des syndicats et celle très importante des élus à ces questions et accroître la mobilisation de tous. Tous les Canadiens devraient savoir ce qu’on offre et demande en leur nom dans le cadre de la libéralisation des services, comprendre les conséquences et approuver ou non le tout par référendum. Au minimum, un débat public doit avoir lieu, les parlementaires devraient être beaucoup plus impliqués et ils devraient approuver ou non le fruit de ces négociations.

En Europe, une bataille très importante et reliée à l’AGCS est en cours contre la Directive Bolkestein qui instituerait une sorte d’AGCS à l’échelle de l’Europe. Heureusement, son processus d’adoption est plus démocratique et permet à l’opposition de tenter véritablement de la bloquer (prochaine échéance : février 2006). Pour l’instant, les perspectives de la bloquer ne sont pas bonnes. La libéralisation des services par cette directive en Europe mettrait encore plus de pression sur l’ensemble des pays membres de l’OMC. Voir : http://www.stopbolkestein.org et
http://www.france.attac.org/IMG/pdf/4pagesBolkesteinVF.pdf.
En terminant, ce texte du réseau Our world is not for sale, signé par Attac Québec, fournit une vision claire de ce que sont les alternatives aux politiques de l’OMC et ce qui devrait les fonder. À lire : http://www.ourworldisnotforsale.org/about.asp?about=signon&lang=french

Attac Québec fait partie du Réseau québécois sur l’intégration continentale (RQIC) qui lui-même fait partie de l’Alliance sociale continentale (ASC). Aussitôt la Conférence de Hong Kong terminée, l’ASC, qui se consacre aux dossiers continentaux (ALÉNA, ZLÉA, etc.), lançait un appel à la mobilisation contre l’OMC et interviendra dans ce sens lors du FSM de Caracas. L’ASC formule des alternatives aux politiques d’intégration économique qui sont menées. À lire sur le sujet :
http://www.ameriques.uqam.ca/pdf/chro_finale_canet_34.pdf.

Principale source : Attac-France, bulletins de Hong Kong

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