Nous voici donc aux derniers jours d’un été qui, une fois de plus, a pris la forme d’un signal d’alarme clair et puissant : records de chaleur partout, parents et amis inondés, feux de forêt, nappes d’hydrocarbures dans le fleuve, la liste est longue. Je relis un article paru dans Le Devoir, au début de l’été. Alexandre Shields y portait à notre attention une information qui aurait dû tous nous faire trembler : « Pour le moment, les engagements pris par les États conduisent le monde vers un réchauffement qui irait au-delà des 2,5°C, à supposer que ces engagements soient scrupuleusement respectés. » (Le réchauffement planétaire dépassera les 2,5 °C, préviennent les experts du climat. Le Devoir, 8 mai 2024).
Pourtant, les conclusions des experts du GIEC (ainsi que l’Accord de Paris dont le Canada est signataire) sont très claires : la limite à ne pas dépasser, la limite du « VIABLE », est celle d’un réchauffement de 1,5°C. Plafond ultime que nous avons, d’ailleurs, franchi temporairement au cours de la dernière année.
Mais qu’attend-on pour réagir ?
Les solutions existent, elles sont clairement déclinées dans les derniers rapports du GIEC. Si elles bousculent certes nos habitudes, elles sont aussi porteuses d’un monde plus juste, plus doux, au rythme moins effréné. Une alternative est possible, et surtout, elle peut être belle. Beaucoup plus que le chaos qui nous guette si l’on ne bouge pas. La science est sans équivoque : Il est encore temps d’agir, il n’est pas trop tard.
Nous sommes donc plus que jamais à la croisée des chemins. D’un côté nous pouvons choisir d’ignorer l’implacable réalité. S’empêtrer dans notre sentiment d’impuissance, notre cynisme. Choisir d’être cette tranche d’humains qui, à un point particulièrement charnière de l’histoire, aura laissé délibérément l’humanité se détruire, entraînant les rêves de nos enfants et petits-enfants avec elle.
Ou nous pouvons choisir, collectivement, de nous lever, de sortir de notre apathie et de renverser le cours des choses. Si les humains peuvent certes détruire, l’histoire nous a prouvé que nous sommes aussi capables d’extraordinaire.
À contre-courant du défaitisme qui nous mine, osons être cette grande époque qui aura réussi à relever l’un des plus importants défis auquel l’humanité a fait face jusqu’à présent. Cette avenue-là est encore toujours possible. Il suffit de la choisir, massivement. Et immédiatement. Très concrètement, les émissions de GES doivent être réduites de 45 % d’ici 2030, pour ensuite atteindre la carbo-neutralité en 2050 (GIEC, 2018). Cet objectif devrait guider l’ensemble de nos actions, individuelles comme collectives. La fenêtre d’opportunité se referme rapidement, le temps presse.
Cette lettre est un appel à se lever, maintenant. Dans chacun de nos milieux, mobilisons-nous, prenons la parole, tentons de changer les choses. Individuellement, prenons chacun et chacune une résolution pro-environnementale pour la prochaine année, dans la mesure de nos capacités : réduire notre consommation, manger moins de viande, utiliser moins la voiture. Prenons la parole et questionnons chaque projet qui ne semble pas mener vers une réduction drastique des GES. Allons faire un tour dans nos institutions démocratiques : conseils de ville, de MRC, d’arrondissement. Applaudissons les pas en avant. Empêchons les pas en arrière. Amenons la question de l’environnement autour de l’îlot de cuisine. Ne tentons pas de s’antagoniser, mais bien de se rejoindre. S’il y a une question qui devrait faire consensus, au-delà de toute allégeance politique, c’est bien celle de la survie de l’humanité. Échangeons sur nos pratiques, nos idées. Nos craintes aussi. Ramenons ces questionnements au goût du jour, pour qu’ils soient sur toutes les lèvres. Partout. Comme une évidence qui nous donne de la force. Rameutons-nous. Faisons-nous entendre. Descendons massivement dans la rue, écrivons, créons, parlons-en, partout. Nous sommes ce peuple capable de se soulever. Exigeons de nos élus qu’ils soient à la hauteur du défi. Montrons-leur que la population voit grand. Pour qu’il y ait une suite à notre monde.
[i] Geneviève Perron est photographe et directrice de photographie au cinéma et à la télévision. Elle est aussi professeure à l’École des Médias de l’UQAM, responsable du programme du baccalauréat en création-médias (cinéma) et membre active de l’organisme Mère au front. En parallèle avec sa pratique artistique, ses convictions écologiques l’ont amenée à diriger ses recherches vers l’éthique environnementale dans la création cinématographique. Si elle n’est pas derrière sa caméra ou devant sa classe, ne la cherchez pas, elle est probablement quelque part dans la nature.
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