Alors que s’ouvre à Paris la plus importante conférence internationale sur le climat, le bulletin analyse quelques enjeux essentiels liés à la sécurité alimentaire : les droits de propriété intellectuelle sur les semences accordés à certaines multinationales dans les accords de libre-échange , particulièrement le Partenariat transpacifique (PTP). Leur ratification bafouerait les droits ancestraux des agriculteurs partout dans le monde et porterait de graves atteintes à la biodiversité. Un autre article rappelle que la façon dont nous luttons contre les changements climatiques – par les mécanismes du marché du carbone – a pour conséquence une nouvelle forme d’accaparement des terres des paysans du Sud, et porte une autre atteinte aux droits alimentaires. Le compte-rendu du dernier livre de Naomi Klein regarde le monde de façon positive en montrant qu’il est en train de changer par une multitude d’actions citoyennes partout sur la planète et rappelle qu’il ne faut pas attendre de solutions magiques de nos dirigeants politiques, mais que c’est la mobilisation citoyenne qui permettra de changer le système seule alternative pour sauver le climat.
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À l’occasion de la tenue de son assemblée générale annuelle, Attac Québec a invité Maxime Combes, membre du Conseil scientifique d’Attac France, à nous entretenir des enjeux de la Conférence des Nations Unies sur le Climat (COP21) qui se tiendra… Lire la suite »
Tout commence par une semence… Pour de nombreuses communautés du monde, c’est la petite agriculture paysanne et familiale qui les nourrit. En Afrique et en Asie, c’est environ 80% des populations qui dépendent de cette agriculture de proximité pour leur… Lire la suite »
Le Partenariat transpacifique (PTP), un traité de libre-échange signé en pleine campagne électorale et liant le Canada à 11 autres pays dont les États-Unis, l’Australie et plusieurs pays asiatiques, viendra bouleverser considérablement de nombreux aspects de la production agroalimentaire mondiale.… Lire la suite »
En 2009, le bulletin consacrait 2 numéros à la crise alimentaire et identifiait l’accaparement des terres par des investisseurs (Fonds de pension, Banques, pays étrangers, etc.) pour la production de biocarburants ou de cultures d’exportation – sous couvert de projets… Lire la suite »
Compte rendu du livre de Naomi Klein, Acte Sud, 2015Le titre anglais est plus parlant : « This changes everything : Capitalism VS the climate ». Oubliez tout ce que vous croyez savoir sur le réchauffement climatique. La « vérité qui dérange » ne tient pas aux gaz à effet de serre (GES), la voici : notre modèle économique est en guerre contre la vie sur Terre. Au-delà de la crise écologique, c’est bien une crise existentielle qui est en jeu – celle d’une humanité défendant à corps perdu un mode de vie qui le mène à sa perte. Pourtant, prise à rebours, cette crise pourrait bien ouvrir la voie à une transformation sociale radicale susceptible de faire advenir un monde non seulement habitable, mais aussi plus juste. On nous a dit que le marché allait nous sauver, alors que notre dépendance au profit et à la croissance nous fait sombrer chaque jour davantage. On nous a dit qu’il était impossible de sortir des combustibles fossiles, alors que nous savons exactement comment nous y prendre- il suffit d’enfreindre toutes les règles du libre marché : brider le pouvoir des entreprises, reconstruire les économies locales et refonder nos démocraties. On nous a aussi dit que l’humanité était par trop avide pour relever un tel défi. En fait, partout dans le monde, des luttes contre l’extraction effrénée des ressources ont déjà abouti et posé les jalons de l’économie à venir. Naomi Klein soutient que le changement climatique est un appel au réveil civilisationnel, un puissant message livré dans la langue des incendies, des inondations, des tempêtes et des sècheresses. Nous n’avons plus beaucoup de temps devant nous. L’alternative est simple : changer… ou disparaitre. Les points saillants du livre de Naomi Klein sont les suivants :
La droite a raison : le climat est une cause au potentiel révolutionnaire (d’où l’intérêt pour la droite de le nier)
C’est la croyance fondamentaliste au libre marché qui surchauffe la planète
La pensée magique domine souvent la réflexion dans le domaine du contrôle des GES : des ONG vertes qui s’allient au Big Business en cautionnant une ou des bourses du carbone qui ne peuvent rien régler, des milliardaires qui prétendent sauver la planète en investissant dans diverses technologies finalement énergivores, ou des pays envisageant des technologies, en fait polluantes, pour filtrer les rayons du soleil, etc.
Les nouveaux guerriers du climat, qu’on peut identifier dans la plupart des pays du monde et qu’elle appelle Blockadia, comprennent entre autres :
les communes européennes qui remunicipalisent leurs entreprises d’électricité, d’eau, de gaz, de réseaux de chauffage…
les ONG réclamant l’abolition des paradis fiscaux, les taxes sur les transactions financières, les écotaxes (sur le carbone par exemple), le transfert d’une partie des budgets militaires, ou l’arrêt des subsides aux hydrocarbures, pour faciliter le financement des changements requis en énergie, en agriculture, en adaptation aux dérèglements climatiques, etc.
les au tochtones de chacun des continents luttant, entre autres par leurs droits territoriaux, pour la sauvegarde de leur habitat, menacé en particulier par les initiatives extractivistes minières et forestières multiples
les empêcheurs d’oléoducs additionnels, de fracturation hydraulique, ou plus simplement de mines détruisant la nature localement
les groupes appuyant d’autres causes (que le climat) ayant identifié comme problème principal le système économique assurant la maximisation du pouvoir des entreprises multinationales et ayant comme prémisse que la Croissance solutionne tout.
Les catastrophés par BP dans le golfe du Mexique, par Enbridge à la rivière Kalamazoo, par MM&A au lac Mégantic, par Bhopal aux Indes, etc.
Les premières victoires annonciatrices, trop peu nombreuses bien sûr, mais seuls espoirs que l’humanité ne finisse pas par disparaître d’ici peu :
projets climatiquement insalubres bloqués ou très retardés un peu partout à travers le monde
désinvestissements de fonds importants dans les industries de combustibles fossiles
réinvestissements par certains de ces mêmes fonds dans les filières énergétiques renouvelables
La « démocratie » représentative a ses limites, en particulier dans un contexte d’élections souvent gagnées par le parti le mieux financé par les corporations, et un contexte de complicité entre les institutions gouvernementales et les entreprises. Il est probablement plus prometteur de compter sur l’amour de citoyens pour leur environnement immédiat, tant pour résister au développement sale que pour construire des alternatives ; les gouvernements municipaux appuient d’ailleurs plus souvent ces deux éléments de l’ADN du changement social, et sont plus sensibles à la gestion locale de l’environnement que les paliers « supérieurs »
Le levier principal pour le changement requis pour le climat demeure, tant au Nord qu’au Sud, l’émergence d’alternatives concrètes, pratiques et positives au développement sale.
Le Nord, les riches, les corporations multinationales n’aideront pas le Sud, les pauvres, ou l’humanité par grandeur d’âme, par sens éthique et moral, ou parce que c’est la bonne chose à faire ; seule la question de survie collective peut fédérer des efforts provenant de partout.
La survie de la planète dépend de la capacité des humains à faire en sorte que sa portion vivante ne requiert que peu d‘intrants autres que le soleil, ne produise presque pas de déchets, et se développe selon des processus résilients, ou plutôt activement regénératifs. une perspective radicalement différente de la « croissance infinie » du capital recherchée, ou encore des rêves des géo-ingénieurs.
Seuls les mouvements sociaux de masse peuvent sauver la planète de la trajectoire « suicidaire » actuelle menée par l’ensemble des plus puissantes organisations humaines (corporations et pays). C’est possible, même si les succès de changements radicaux dans le domaine économique faits quasi sans guerres internationales et quasi démocratiquement sont rarissimes, les seuls exemples importants touchant les profits des dominants étant l’abolition de l’esclavage au 19e siècle, et la montée du mouvement syndical à la suite de la Grande Dépression de 1929.
Seuls des moyens concrets et pérennes de redistribution de la richesse mondiale peuvent faire aboutir les libérations visées par une myriade de mouvements pour les droits humains, l’égalité réelle des chances, la décolonisation, la sécurité alimentaire, la réinvention de la notion de « bien commun », etc. le tout pouvant maintenant être fédéré par la poussée requise par la lutte aux changements climatiques, confrontant directement l’idéologie de libre marché comme solution à tout, et brisant simultanément de multiples règles comme les traités de libre-échange, et lois nationales écrites, ainsi que de nombreuses règles non écrites comme « aucungouvernement ne peut survivre à une hausse de taxes », comme « impossible de dire non à des investissements majeurs » ou comme « on ne peut faire décroître les pans de l’économie qui nous mettent en danger ».
Dans ce contexte, peut-être que la meilleure stratégie anti changements climatiques, même si une taxation du carbone semble une stratégie plus directe, est de réclamer prioritairement un revenu minimum garanti, ce qui remet en cause l’absolue nécessité de la croissance et la priorisation des profits, et rend incontournable les notions d’interdépendance, de réciprocité et de coopération, plutôt que celles d’individualisme, de domination et de hiérarchie.
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