Vous reconnaissez sans doute ce petit encadré où vous avez sûrement déjà apposé votre signature.
Eh oui! Le doux temps des impôts est de retour et vous devrez produire, d’ici le 30 avril 2021, vos déclarations de revenus au fédéral et au provincial.
Nos deux systèmes fiscaux reposent sur le principe de l’autocotisation. Mais qu’est-ce donc que ce principe?
Cela signifie que chacun d’entre nous a la responsabilité de déclarer la totalité de ses revenus, qu’ils proviennent d’ici ou d’ailleurs.
Le principe d’autocotisation est encadré par la Loi de l’impôt sur le revenu, une loi à laquelle nous devons nous conformer comme pour toute autre loi. Mais le principe d’autocotisation repose aussi sur la confiance. Il faut que les citoyens aient confiance dans le système fiscal, qu’il le trouve juste et équitable pour y adhérer. Lorsque ce lien de confiance s’effrite, cela ouvre justement la porte à ceux qui souhaitent payer le moins d’impôt possible et qui sont même prêts à contrevenir à la loi pour y parvenir.
Il y a évasion fiscale lorsqu’un particulier ou une entreprise ignore volontairement les lois fiscales, notamment en falsifiant des documents et des demandes, en omettant délibérément de déclarer des revenus ou en gonflant des dépenses.
D’un point de vue légal, s’il y a une fausse déclaration, c’est le contribuable, en signant sa déclaration de revenu, qui pose un geste criminel. Mais oui! Une fausse déclaration de revenu est une fraude, donc un acte criminel qui peut mener jusqu’à l’emprisonnement, en plus de contraindre à payer l’impôt qui aurait dû être payé, plus des intérêts et des pénalités.
Les professionnels qui contribuent à élaborer ces stratagèmes que l’on nomme joliment des planifications fiscales agressives peuvent quant à eux écoper de ce qu’on appelle des pénalités administratives à des tiers. Malheureusement, ces pénalités sont très peu élevées et peu appliquées, ce qui n’a pas l’effet dissuasif escompté.
Pour aller plus loin, faites avec moi un petit détour philosophique et plongeons-nous dans La République, de Platon, où il se livre à une célèbre expérience de pensée.
Un berger appelé Gygès constate qu’il devient invisible lorsqu’il tourne sur son doigt une bague qu’il a trouvée par hasard. Quand il découvre ce pouvoir, il décide de se rendre au palais royal. Il parvient à séduire la reine, à assassiner le roi et à s’emparer du pouvoir.
Les questions qui sont posées par Platon sont les suivantes: «Est-ce qu’être un homme juste ce n’est pas en réalité être assez naïf pour respecter les lois et la morale même si cela peut être désavantageux?» «Et qu’adviendrait-il si on était certain de ne pas être pénalisé en désobéissant?»
Cela permet de discuter de ce qui nous motive à être moral et dans le cas qui nous concerne ici à nous demander ce qui nous motive à respecter la Loi de l’impôt sur le revenu.
Est-ce la peur d’être pris et puni? Ou bien est-ce notre sens civique qui nous incite à payer notre juste part? Et comment, par quels moyens, est-il juste d’assurer la conformité de tous et toutes à cette loi?
Il est important de prendre en compte, en réfléchissant à tout cela, que nous ne sommes pas tous égaux devant l’impôt et que cela peut avoir un important impact sur notre motivation à respecter (ou non) les lois fiscales.
Lorsque nos revenus proviennent de sources pour lesquelles des relevés doivent être produits (T4- Relevé 1 pour les revenus de salaires, par exemple), il est impossible de ne pas déclarer ces revenus parce que les gouvernements reçoivent copies de tous ces relevés. Par contre, lorsque nous parlons de revenus de travailleurs autonomes, d’entreprises, de location ou des revenus étrangers, il est alors possible de faire de fausse déclaration.
Ce sentiment qu’il y a des gens qui peuvent profiter du système fiscal suscite un sentiment d’injustice et peut effriter justement ce lien de confiance nécessaire au bon fonctionnement de nos systèmes fiscaux. Tout le monde le fait, fais le donc! Ceci étant, cela peut induire la conviction qu’il est légitime de ne pas respecter le système fiscal, en d’autres termes de se faire justice.
On peut souhaiter que tout ceux qui ont les moyens de payer leur juste part, mais qui ne le font pas toujours, se rappellent au moment de signer leurs déclarations de revenus que c’est un geste important! Que l’impôt c’est quand même fantastique! Cela nous permet de rendre notre société plus juste. À tel point, qui sait, que convaincu de son importance, même Gygès ne ferait pas de fausse déclaration.
Souhaitons-nous une année 2021 où tout le monde dira: Vive l’impôt!
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