Comme chaque année, on apprenait, quelques jours – quelques dizaines d’heures à peine – après le Nouvel An, que les chefs d’entreprise avaient engrangé l’équivalent du salaire que leurs employé-es mettraient en moyenne l’année à gagner. Ce serait surprenant, si ce n’était devenu la routine. Ce serait révoltant, si nous n’y étions pas collectivement habitué-es. En plus, on apprenait cette année que la fortune des dix hommes les plus riches de la planète a augmenté au rythme de 900 000$ dollars à la minute . Prenez le temps de relire cette phrase. Les plus riches de ce monde font, en une minute1, plus d’argent que l’écrasante majorité de la population de la planète n’en fera dans toute sa vie. En un an, la fortune collective de ces dix über-privilégiés s’est accrue de 3600 milliards de dollars, ce qui correspond, selon Oxfam-Québec, au total des dépenses annuelles dans le domaine de la santé pour tous les pays du monde combinés2. L’énormité de ce scandale est telle qu’on a peine à la concevoir, et donc à s’en révolter.
Il faut bien prendre acte de ce que de tels chiffres signifient : loin de se résorber, les écarts de richesse planétaires sont au contraire en pleine explosion. Au Québec, le confort relatif dans lequel nous vivons peut peut-être contribuer à faire passer la pilule, ou du moins à nous consoler. Mais lorsque l’on se place du point de vue de la majorité de la population humaine, celle qui survit avec moins de 5,50 $ par jour 3 , on ne peut plus fermer les yeux sur une situation moralement, économiquement, humainement inacceptable. Cinq dollars cinquante par jour correspondent à 2007,50 $ par année : en temps de milliardaire, cette somme équivaut à un peu plus d’un dixième de seconde, si on se fie aux chiffres rapportés plus haut. Les dix personnes les plus riches de la planète gagnent, en un dixième de seconde, plus que ce que la majorité de l’humanité gagnera en une année. Une autre phrase à relire et à méditer.
Pendant ce temps, nos gouvernements nous annoncent que, pour éviter de dépasser la capacité d’accueil de nos services de santé et de nos services sociaux, il faut procéder au délestage des opérations et rendez-vous non urgents. Ils blâment du même souffle les personnes qui refusent de se faire vacciner en raison de la pression qu’elles font subir sur le système de santé et du danger auquel elles exposent leurs concitoyens. Pas un mot sur les effets de décennies de mesures néolibérales d’austérité, de coupures et d’investissements insuffisants dans les réseaux publics.
La pandémie a clairement démontré le cul-de-sac dans lequel nous ont entraîné quarante ans de néolibéralisme. De quelle manière, en favorisant systématiquement les intérêts des plus riches, celui-ci nous mène collectivement au bord du gouffre. Il y a longtemps qu’on aurait dû remédier à la situation, mais cela aurait certainement demandé beaucoup plus de vision et de courage politiques que ceux dont disposent nos dirigeant-es, tous partis confondus. Plus encore, les importants défis écologiques et environnementaux auxquels nous sommes confrontés ne pourront être relevés si les ressources nécessaires pour y parvenir ne sont pas au rendez-vous, ce qui implique nécessairement une imposition et une taxation imposantes des plus riches et des corporations. La répartition équitable de la richesse devient alors une condition de la survie de notre espèce.
La solution n’est donc pas très complexe, en théorie du moins : aller chercher la richesse où elle se trouve. Nous sommes très nombreuses et nombreux à le dire. Une foule de mécanismes de redistribution de la richesse concrets et applicables sont proposés depuis longtemps par des expert-es de même que par des groupes militants, comme Attac Québec et nos allié-es de la Coalition Main rouge et d’Échec aux paradis fiscaux, pour ne nommer que ceux-là. Ce n’est donc pas une fatalité ou une impossibilité réelle de changer les choses qui explique la situation actuelle, mais bien le manque total de détermination et de courage de celles et ceux qui ont été élu-es pour veiller au bien public. À cet égard, nos « démocraties », dans la mesure où il est toujours possible de qualifier de « démocratiques » des systèmes aussi profondément inéquitables et injustes, sont un échec lamentable.
Il est plus que temps que les choses changent. L’attentisme ne nous mènera à rien. Aucun sauveur prophétique ne viendra rendre justice et rééquilibrer le rapport de force entre les possédant-es et les démuni-es. Ce n’est que par la mobilisation et l’action citoyenne que nous pouvons espérer contraindre nos représentant-es politiques à agir. C’est pourquoi Attac Québec invite toutes les personnes soucieuses du bien commun à rejoindre ses rangs et à contribuer, avec l’ensemble de nos allié-es de la société civile, à faire en sorte que le monde dans lequel nous vivons devienne plus juste, démocratique et humain. C’est du moins l’espoir qui nous porte ! Solidarité !
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